Les adieux de l’Etoile Eleonora Abbagnato le 11 juin 2021

J’avais déjà vu la soirée hommage à Roland Petit au Palais Garnier en 2010 (voir mon article ici) avec deux des trois ballets présentés ce vendredi 11 juin 2021: Le Rendez-vous et Le jeune homme et la mort. Je venais certes pour découvrir le Carmen du chorégraphe, mais avant tout pour Eleonora Abbagnato qui tirait sa révérence sur des œuvres du chorégraphe qui l’avait repérée en Sicile à l’âge de 11 ans. Le destin fait parfois bien les choses… J’attendais cette soirée d’adieux, comme tout balletomane qui se respecte, avec une certaine impatience, l’ayant vu annulée à plusieurs reprises depuis fin 2019.

Contrairement à la dernière soirée vue à Garnier en octobre 2020 avant le deuxième confinement, le jeu des danseurs était limpide et maitrisé, fidèle à la tradition d’excellence de la compagnie.

Comme souvent chez Roland Petit, la femme est machiavélique. Dans Le Rendez-vous (1945), d’après un texte de Prévert et dans des décors de Brassaï qui font revivre le Paris des années 50 et dont la danse emprunte beaucoup à la gestuelle des comédies musicales, Eleonora Abbagnato tue son amant sans crier garde. Le ballet de Carmen (1949) est quant à lui flamboyant, vénéneux, sulfureux et cruel. Les inspirations des tableaux de Goya s’avèrent flagrantes. Les scènes de groupe mêlent rappel de french cancan, parodies de l’opéra avec la reprise de façon saccadée, tels des automates, de ses airs les plus célèbres, et violence. Un monde sans pitié, dans lequel Carmen meurt sous les coups de son amant.

Chez Roland Petit le fil entre sublime et violence est ténu. Ainsi dans Le rendez-vous, le pas de deux est tout en sensualité, avant que la plus belle femme du monde ne tue son amant. Une tension que l’on retrouve dans Carmen et La jeune fille et la mort. Roland Petit construit ses ballets dans un mélange de style propre à lui, proche du théâtre.

Les adieux d’Eleonora Abbagnato prenaient alors un sens différent que s’ils avaient eu lieu comme prévu le 23 décembre 2019 sur Le Parc de Preljocaj. La vie d’une danseuse est parsemée d’efforts, de moments sublimes mais aussi de doute quand la promotion comme étoile tarde à venir. En effet elle fut nommée, sur une prise du rôle-titre dans Carmen de Roland Petit en 2013, 13 ans après avoir été nommée première danseuse. Des adieux émouvants avec la présence de sa famille et des filles de son mari, de ses professeurs de danse et d’autres étoiles.

Anne-Laure FAUBERT

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