Autant le dire d’emblée, j’avais déjà vu il y a plusieurs année Le détachement féminin rouge à Garnier et n’avais pas trop apprécié certains messages manichéens:
– le capitaliste / propriétaire terrien est un homme brutal, avide, individualiste, accompagné de sbires du même acabit
– en contrepartie les communistes sont holistes (c’est d’ailleurs là leur véritable amour, celui de la communauté) altruistes… et disciplinés…
– les paysages expriment la félicité absolue, dignes de la Terre promise judéo chrétienne : un fleuve coule encadré de palmiers.
Ces faiblesses pointées, ce ballet est un véritable bijou du point de vue de l’action et de l’art au service de la politique. Dans la Chine du début des années trente, la guerre civile fait rage et oppose les forces armées gouvernementales du Guomindang dirigées par Tchang Kai-Chek à celles du Parti communiste de Mao Zedong. Dans le cadre de sa lutte, le Parti communiste décide de créer une armée entièrement composée de femmes. Au début, la tâche de ces « soldates » est de nourrir les hommes et repriser leurs uniformes. Mais très rapidement ces femmes exigent de leurs commandants de prendre part elles aussi à la lutte armée. C’est dans ce cadre que se déroule le ballet : une jeune paysanne, Qionghua, est emprisonnée par le despote local, Nan Batian, qui veut la vendre. Elle arrive à s’échapper mais est rattrapée, battue et laissée pour morte. Elle rejoint les communistes et participe à la lutte contre les propriétaires terriens et prend, à la fin du ballet, la tête du Détachement.
On y perçoit la forte influence de l’école russe (cf mon billet précédent) tant dans les scènes de groupe que dans le fouetté des jambes, adaptée à la culture chinoise avec des acrobaties. Si ce ballet vante l’Homme nouveau, je n’ai pu m’empêcher de sourire face à certains vestiges du passé : les jeunes femmes reprisent les habits des soldats ; Nan Batian et ses invités regardent de jeunes esclaves danser comme un peu plus tard quatre soldats regardent de jeunes paysannes danser. Le final laisse songeuse côté géopolitique, surtout lorsque l’on sait que ce ballet fut donné devant le président Nixon lors de sa visite de 1972 en République populaire.
Au final un ballet dont on sort galvanisée par la force qui s’en dégage et amusée par le fait d’avoir croisé des ouvreurs déguisés en gardes chinois et des personnes placées à l’orchestre arborer le brassard rouge des révolutionnaires…
Le passé d’une illusion de l’historien François Furet sur la fascination du communisme en France ne semble pas si loin…
I’ve been absent for some time, but now I remember why I used to love this blog. Thank you!