« Boldini les plaisirs et les jours » au Petit Palais

Cela faisait longtemps que je n’avais pas vu une exposition qui mêle autant histoire de l’art et histoire du costume pour mon plus grand bonheur. Le Petit Palais propose en effet une exposition consacrée à l’artiste italien Giovanni Boldini (1842-1931) qui fut l’une des plus grandes gloires du Paris du tournant des XIX° et XX°s et un observateur attentif de la haute société qu’il fréquentait.

Né en Italie à Ferrare en 1842, Boldini passa cependant la majeure partie de sa vie à Paris. Formé par son père, peintre à Ferrare, Giovanni Boldini s’installe à 18 ans à Florence, qui est alors le centre de la vie culturelle et artistique en Italie. Deux peintres, Michele Gordigiani et Cristiano Banti l’introduisent dans les cercles artistiques et auprès d’une société mondaine qui lui commande des portraits. Un temps proche des Macchiaioli, groupe d’initiateurs de la peinture moderne italienne, il est remarqué par une richissime anglaise Isabelle Robinson Falconer qui le présente aux grandes familles italiennes et étrangères.

En 1871 il s’installe à Paris où il est rapidement introduit dans les milieux artistiques et devient proche de Degas. Protégé du marchand Adolphe Goupil, il se consacre à « l’art à la mode »: des peintures de genre de petites dimensions avec des personnages en costume du XVIII° siècle qui séduisent la nouvelle bourgeoisie entrepreneuriale. Il peint Berthe, sa maîtresse, dans différents lieux et montre l’aspiration de la société française au bonheur, après l’épisode de la Commune.

Sur un banc au Bois – 1872 – Giovanni Boldini – Photo: Anne-Laure Faubert

Le succès est au rendez-vous et Boldini vend à l’époque mieux et plus cher que Manet. Comprenant les mécanismes du marché de l’art, il change ses sujets et dans les années 1880 revient à sa vocation de portraitiste. Grâce à la comtesse Gabrielle de Rasty, qui l’introduit dans les cercles de la haute société parisienne, il reçoit de nombreuses commandes et obtient un grand succès lors de l’Exposition universelle de 1889 où il présente douze tableaux. Boldini témoigne avec sa peinture d’un goût prononcé pour la mode. Il brosse les plus belles tenues des couturiers Worth, Paul Poiret, Jacques Doucet et bien d’autres… Les stylistes deviennent des créateurs à part entière. 

G.Boldini, Portrait de Rita de Acosta Lydig assise, 1911,
Huile sur toile, Collection Mr and Mrs James O. Coleman – Photo: Anne-Laure Faubert

Son style se caractérise par une touche rapide, une attention à la pose du modèle, une mise en valeur de la ligne serpentine des corps et un côté électrique dans le choix des couleurs. Il peint beaucoup au pastel, ce qui permet de restituer la brillance des étoffes et n’hésite pas à allonger les bras et les mains des modèles jusqu’à l’exagération. Il aplatit également la figure dans l’espace, sans profondeur, s’inspirant ainsi de la peinture japonaise. La haute bourgeoisie faisant de la mode la substitution de la naissance (noble), avoir son portrait peint par Boldini devient un symbole de réussite. La poétique de la Parisienne se dévoile également dans ses portraits, cette femme qui aime la mode et est la mode selon les mots de Musset.

En recherchant à capter l’essence de son temps, Boldini en a également peint les névroses en montrant des femmes représentées comme des oiseaux effarouchés ou à bout de nerfs. En fixant par ses portraits le Tout-Paris de la Belle Epoque, Boldini semble avoir peint les équivalents picturaux des personnages de la Recherche de Marcel Proust.

Anne-Laure FAUBERT

Petit Palais – Boldini les plaisirs et les jours – jusqu’au 24 juillet 2022

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