« Allumer une Akari, c’est certes allumer une lampe mais c’est aussi allumer une sculpture. » écrit Thibaut Varaillon, auteur d’Akari. Les chemins de la lumière.
Après avoir grandi au Japon et aux Etats-Unis, Isamu Noguchi (1904-1988), fils non reconnu du poète japonais Yonejiro Noguchi (1875-1947) et de la journaliste américaine Léonie Gilmour (1873-1933) créa en 1951 les lampes Akari.

Pour les 70 ans de la création des lampes Akari, Wa Design Gallery a rassemblé et exposé 70 modèles vintage provenant du Japon, des Etats-Unis, d’Italie et de France, et répertorié et identifié plus de 240 modèles différents dans le catalogue de l’exposition. Les 70 modèles exposés ont tous été créés du vivant de l’artiste et sont reconnaissables à leur signature : un soleil et une lune rouge, auxquels s’ajoute dans les années 1980 une signature.
Ayant fait ses armes chez Brancusi, Isamu Noguchi pense ses lampes comme des sculptures. Dessinées par Isamu Noguchi, composées de papier « washi », de bambou et de métal, ces lampes sont toutes réalisées à la main. Réinterprétant les lanternes traditionnelles japonaises elles revêtent d’innombrables formes : rondes, elles prennent parfois la forme de cube ou de torsade ou s’inspirent des traditionnels gâteaux à 3 étages japonais. A la fois source de lumière et objet d’art, elles invitent à une réflexion sur la lumière, lorsque la nuit tombe et que la pénombre envahit la pièce : les ombres projettent alors les formes de l’œuvre, laissant coexister l’ombre et la lumière en harmonie. Une esthétique du clair-obscur théorisée par Jun’ichiro Tanizaki et fortement présente au Japon. Bien plus qu’un simple objet utilitaire, une Akari invite à sculpter le vide qui l’accueille.

Il est intéressant de noter qu’alors même que son père refusait qu’il utilise son patronyme sur le sol japonais, Isamu Noguchi a voulu, par ses Akari, créer un lien invisible entre tous les utilisateurs de ces lampes. Sans rentrer dans la philosophie de comptoir, c’est à la lumière et à un design d’inspiration japonaise que l’artiste consacra plus de 30 ans de sa vie. Une façon de renouer avec ce père distant, de faire lumière sur une partie de ses racines ? Quoiqu’il en soit, ce pont entre l’Asie et l’Amérique, la tradition et la modernité, le matériel et l’immatériel a su m’émouvoir, moi qui avais peu de connaissance sur le sujet en entrant dans la galerie. J’ai eu un gros coup de cœur pour les 3 lampes de droite sur la photo ci-dessus, et notamment celle décorée par des idéogrammes.
La présence dans un seul lieu de ces 70 œuvres, patiemment collectées pour l’exposition et bénéficiant de la connaissance de Christophe Magnan, codirecteur de Wa Design Gallery et collectionneur passionnée de lampes Akari depuis la fin des années 1990 permet de très belles associations d’œuvres, tantôt suspendues, tantôt posées près du sol dans une atmosphère japonisante apaisante.
Une exposition, gratuite, à découvrir jusqu’au 23 juillet 2021 dans le Marais, pour former son œil et aiguiser son sens esthétique.
Anne-Laure FAUBERT
Exposition jusqu’au 23 juillet 2021 – Espace 13 Sévigné, Paris III°