« Paris-Athènes – Naissance de la Grèce moderne 1675-1919 » au musée du Louvre 

Pour fêter le double bicentenaire des débuts de la guerre de Libération de la Grèce, le 25 mars 1821, et de l’entrée au Louvre de la Vénus de Milo  le 1er mars 1821, découverte en 1820, le musée du Louvre organise l’exposition Paris-Athènes – Naissance de la Grèce moderne 1675-1919 qui interroge sur la vocation particulière que tient la Grèce dans l’identité culturelle de l’Europe et sur la place de l’art grec antique dans les collections du Louvre.

Les deux dates de l’exposition constituent son fil conducteur, de la visite en 1675 de l’ambassade du marquis de Nointel en route vers Constantinople faisant une halte à Athènes et y découvrant une ville un peu endormie de l’empire ottoman, à l’exposition à Paris en 1919 des œuvres du groupe grec Techni, proche des avant-gardes européennes. Entre ces deux dates la Grèce est devenue un Etat; libérée en 1829, elle proclame Athènes comme capitale en 1834. 

Cette exposition Paris-Athènes – Naissance de la Grèce moderne 1675-1919 montre le double héritage de la jeune nation qui se crée alors: l’Antiquité et la culture byzantine. Les territoires qui forment la Grèce actuelle appartiennent à ce que nous appelons l’Empire byzantin, conquis à partir de 1071 par les Ottomans. En 1456, Athènes est prise par les Turcs. La tradition chrétienne n’en reste pas moins très présente et la religion orthodoxe centrale pour la culture grecque. L’exposition montre ainsi le développement de l’art de l’icône post-byzantine à l’époque moderne dont un rare Gréco prêté pour la première fois, une Dormition de la Vierge revue selon des canaux occidentaux.

Dormition de la Vierge – El Greco – Eglise de la Vierge – Ermopoulis – SYROS Copyright: Hellenic Ministry of Culture and Sports

L’exposition Paris-Athènes – Naissance de la Grèce moderne 1675-1919 rappelle également que la lutte grecque pour son indépendance fut la première mobilisation pan-européenne des intellectuels, qu’il s’agisse de Delacroix, Victor Hugo ou Lord Byron qui y fit le sacrifice ultime.

La Grèce sur les ruines de Missolonghi – E. Delacroix – Copyright: Musée des Beaux-Arts de Bordeaux – Mairie de Bordeaux. Photo: F. Deval

Alors que les Grecs se sont révoltés pour établir une République, c’est une Monarchie avec un prince bavarois, Othon Premier, qui leur est imposée. (Cela annonce ce qui se passe quelques décennies plus tard en Amérique du Sud). La reine Amalia crée alors un costume de cours grec en s’appuyant à la fois sur la mode Bidermeier de son pays d’origine et sur les costumes grecs traditionnels. Les magnifiques costumes du musée Benaki (l’un de mes trois musées préférés à Athènes avec le musée byzantin et chrétien et le musée des Arts cycladiques) montrent au public parisien ce que furent les costumes grecs du XIX°S, et notamment ceux de la Cour.

Habit de cour de Marie Bonaparte – Copyright: Musée Benaki, Athènes, 2021

Le visiteur apprend également qu’Athènes – du moins son centre actuel ai-je envie de rajouter – fut construite par des artistes munichois avec de larges avenues et des bâtiments néoclassiques. L’art grec qui se développe alors, notamment en peinture et en sculpture, est teinté de néoclassicisme bavarois mâtiné de réalisme français puisque les artistes sont envoyés en Bavière, où Courbet a également laissé son empreinte. Athènes passe ainsi en quelques décennies d’une ville ottomane à une capitale européenne.

C’est également l’occasion de découvrir que les corps expéditionnaires envoyés pour libérer la Grèce sont accompagnés de scientifiques, qui collectent des informations sur la Grèce. Le Péloponnèse est libéré par l’armée française en 1828 et en remerciement le gouvernement grec offre à la France le décor d’Olympie. Les fouilles du sanctuaire de Delos dans les années 1870 sont les premières grandes fouilles d’un sanctuaire dans son intégralité et sont liées à la création d’une école française d’Athènes. Les lois de protection empêchant la sortie d’objets permettent à la Grèce de garder ses trésors et aux pays européens de fonder leurs connaissances sur des moulages. La renommée et la fascination pour l’antiquité grecque continuent pourtant d’occulter la connaissance de la Grèce moderne, malentendu que l’on retrouve en 1919 lors de l’exposition du groupe grec Techni à Paris. Alors que le public parisien attend des œuvres d’inspiration antique, il découvre des œuvres d’avant-garde.

C’est une exposition que j’ai personnellement appréciée car elle met en en évidence les liens culturels, historiques et artistiques noués entre les nations française et grecque, qui ont conduit à la définition de la Grèce moderne. J’y ai revu avec plaisir des œuvres des musées athéniens et découvert des icônes d’îles que je connaissais pas (à noter pour de prochaines pérégrinations ; ) )

Anne-Laure FAUBERT


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