Cela fait 2 fois que je me rends à Chaillot et que j’en sors en me disant que oui, la danse est le seul art selon moi capable de transcrire l’indicible.
Début juin je voyais LAC de Maillot (ma critique ici pour le site Bachtack) et hier le Nederlands Dans Theater , qui n’était pas venu à Paris depuis 2006, avec 3 ballets de Kylian, Pite et Leon / Lightfoot. Un spectacle voulu comme un « passage de témoin » entre le fondateur de cette compagnie, Kylian, et les nouveaux directeurs du ballet.
Je n’ai jamais caché que je suis fan du chorégraphe Jiri Kylian: Kaguyahimé (1988) fait partie de mes ballets préférés comme je l’expliquais dans ce billet. Par ailleurs, la soirée Teshigawara / Brown / Kylian de l’Opéra de Paris en novembre 2013 avait été « sauvée » par Doux mensonges (1999) de Kylian (cf ce billet).
Mémoires d’oubliettes (2009) est une oeuvre dure, qui peut dérouter. Sur une musique contemporaine de Dirk Haubrich et une scénographie de Yoko Seyama, le chorégraphe s’interroge sur la mémoire et la violence. Un court film introductif joue avec les mots: oubli, doutes, mères…Différents noms tombent du titre. Puis apparaissent 6 têtes de prisonniers semble-t-il. Ils évoluent au son d’une musique brutale qui rappelle à la fois les interrogatoires de police, la rétention et le doute. La scène est dépouillée, seule des boites de conserve sont poussées par un balais, avant de tomber sur le dernier danseur, survivant (?). Figures de groupe et pas de deux alternent, entre danse saccadée et gestes déliés.
Solo Echo (2012) de la canadienne Crystal Pite sur une musique de Johannes Brahms s’interroge sur l’altérité, la tentation du double et la place à trouver dans un groupe. La neige, unique « décor » tombe au fond de la scène, nous entraînant vers la rêverie. Sept danseurs évoluent, semblant se chercher soi-même. Une très grande douceur se dégage de ce ballet…
Shoot the Moon (2006) de Sol Leon et Paul Lightfoot sur une musique de Philip Glass m’a rappelé Doux mensonges pour son utilisation de la caméra qui permet de sonder les sentiments humains. Les pans d’une maison au papier peint vieillot tournent sur scène, dévoilant dans chacune des 3 pièces un ou deux personnages. Trois pièces, 3 histoires différentes mais qui se rejoignent. Une variation sur l’amour, avec des doutes, des départs, des questionnements – forte utilisation d’une mimique qui rappelle celle du Faune. Un seul regret: le cri d’un des danseurs. Comme celui du Comte dans Les enfants du Paradis (cf ce billet), ce cri est de trop. La danse se passe selon moi de ce genre d’artifices…
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