Pour ceux pour qui, comme moi, Giacometti évoque des sculptures, comme le célèbre Homme qui marche, mais ne connaissent pas le parcours de l’artiste, l’exposition qui vient d’ouvrir ses portes au musée Maillol a le grand mérite de le replacer dans son contexte historique et culturel.

À travers un parcours chronologique et thématique et dans une scénographie dépouillée et des tons gris, l’exposition Giacometti, entre tradition et avant-garde montre les différentes influences du sculpteur : l’art extra européen, l’art cycladique – flagrant dans La femme qui marche (1932) – tout en faisant dialoguer ses œuvres avec celles de Bourdelle, Rodin, Zadkine, Brancusi…montrant ainsi les relations entretenues avec ces artistes à chacune des étapes de l’évolution du style de Giacometti. On y découvre d’abord les œuvres de jeunesse de Giacometti, marquées par la modernité classique puis sa rencontre avec les avant-gardes parisiennes après 1925.

Alberto Giacometti (1901-1966) est le fils d’un peintre néo-impressionniste renommé, Giovanni Giacometti et grandit dans l’atelier paternel en Suisse italienne. Il réalise à 13 ans son premier buste d’après-nature, prenant son frère Diego pour modèle. En 1922 Alberto Giacometti part à Paris pour suivre les cours du sculpteur Antoine Bourdelle (1861-1929). Il est marqué par cette éducation qui associe un enseignement classique d’après nature à une approche formelle du volume par facettes géométriques.

L’exposition permet de découvrir l’une des obsessions artistiques de Giacometti à partir de 1935 : la figure féminine. En sculptant sans relâche des têtes de femmes, il cherche à en capter l’essence intrinsèque. « Mais l’aventure, la grande aventure, c’est de voir surgir quelque chose d’inconnu chaque jour, dans le même visage. Ça vaut tous les voyages autour du monde » déclare-t-il. La salle consacrée aux têtes est à cet égard saisissante : des têtes de femmes s’alignent devant le visiteur mêlant des œuvres de Bourdelle, Maillol et Giacometti. Le nom des modèles importe peu : on y reconnait son style, où les traces des doigts sont visibles, et sa volonté farouche de saisir l’essence du modèle, plus que d’en donner une image réaliste. On est donc loin du portrait au sens classique du terme. « La sculpture n’est pas un objet, elle est une interrogation, une question une réponse. Elle ne peut être ni finie, ni parfaite » écrit-il en 1957.

Le thème de l’homme qui marche est présent dans l’œuvre de Giacometti dès la fin des années 1940 et s’enrichit de différentes combinaisons : à côté des figures individuelles, Giacometti conçoit aussi des groupes de personnages. Il est intéressant de noter que le mouvement de la marche est cependant rapidement réservé à ses figures masculines, alors que ses sculptures féminines sont strictement hiératiques et immobiles.
L’homme qui marche comme symbole de l’humanité en marche. Reste à savoir si celle-ci sait où elle va…
Anne-Laure FAUBERT
Lu et relu après visite, justesse et prévision font ce billet ! Je prendrai encore un peu de temps pour rédiger le mien ! Merci
Merci beaucoup pour ce sympathique message : ))