Corot : Le peintre et ses modèles au musée Marmottan: un angle d’approche inédit

C’est en présence du commissaire de l’exposition Sébastien Allard, conservateur général du patrimoine et directeur du département des Peintures du musée du Louvre, que nous avons visité l’exposition “ Corot: Le peintre et ses modèles. Alors que Corot est avant tout reconnu pour ses paysages et que ses portraits sont peu connus de son vivant, cette exposition met en avant une soixantaine de portraits provenant de collections privées ou publiques d’Europe et des Etats-Unis.

Jean-Baptiste Camille Corot Jeune femme assise des fleurs entre les mains ou Madame Legois vers 1842 Vienne, Österreichische Galerie Belvedere © Belvedere, Vienne

Si l’exposition ouvre sur Jardin à Tivoli pour rappeler l’importance du paysage, elle distingue ensuite la figure du portrait et du modèle.

Un portrait est une représentation d’une personne grâce à une interprétation de l’artiste. « Bien qu’uniquement visuel, le portrait peut rendre très sensible la personnalité intérieure du modèle, par de nombreux indices tels que la pose, l’expression de la physionomie, … » (Etienne Souriau – philosophe français du XXème siècle). Dans un portrait se dégage l’apparence physique de la personne avec sa beauté et ses traits mais on peut aussi ressentir sa vie intérieure avec son caractère et ses sentiments.

Jean-Baptiste Camille Corot Jeune Fille grecque à la fontaine vers 1865-1870 Paris, musée du Louvre.

Les portraits sont concentrés sur les débuts de la carrière de Corot, cadeaux pour ses proches ou “exercices” et relèvent du cadre intime. On y retrouve l’emprise de Ingres sur Corot et on songe alors au portrait de Mademoiselle Rivière, inspiré de Raphaël. Là où Ingres recherche le volume, Corot recherche l’abstraction du volume et construit de façon synthétique ses figures.

La Femme ‡ la perle
Jean-Baptiste Camille Corot La Femme à la perle
vers 1868-1870
Paris, musée du Louvre, département des Peintures
Photo © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) /  Stéphane Maréchalle 

On découvre aussi l’importance de l’enfant chez Corot, soit dans un paysage, soit comme intercesseur entre deux mondes différents. Il rajoute ainsi dix ans après un enfant dans un tableau sur la Cathédrale de Chartres.  Dans la première salle de l’exposition c’est un enfant sage en voie de socialisation qui nous est donné à voir, bien loin des enfants monstrueux de Géricault. L’enfant chez Corot a quelque chose de naïf, dans la droite ligne de Rousseau. Un intérêt d’autant plus marquant que Corot n’est pas marié et n’a pas d’enfant.

Cette exposition permet également de découvrir les voyages en Italie du peintre sous l’angle des topoï du brigand, du jeune brigand, du prêtre ou de la moissonneuse. Les modèles masculins sont rares chez le peintre et prennent la forme de figures de moines et de portraits.

Jean-Baptiste Camille Corot Jeune Italien assis vers 1825 Reims, musée des Beaux-Arts de la Ville de Reims © Photo : C. Devleeschauwer

Les modèles féminins chez Corot sont ambigus, à la fois offerts au regard et refusés. On retrouve également certaines erreurs anatomiques comme chez Ingres.

La liseuse s’inspire ainsi aussi bien de la gravure de Dürer que de la peinture hollandaise du XVII°s et de la peinture française du XVIII°s tout en proposant une nouvelle approche avec la sensualité latente des cheveux et du chemisier ouvert sur la poitrine. Corot transporte aussi sa liseuse à l’extérieur, célébrant ainsi la fusion de l’homme et de la nature, de la figure et du paysage. Enfin, le thème de la femme à la fontaine avec une cruche constitue l’une des variations favorites de Corot; certaines rappelant des tableaux de Poussin.

Cette exposition permet ainsi de connaître un aspect moins connu de Corot qui sont ses portraits. Il va approcher ces personnes avec un succès fou : que ce soit des portraits de personnes de sa famille, des posés nus de ses maîtresses, des paysannes, des enfants, des femmes de la haute société, des hommes en armure symbolisant les soldats, des modèles d’ateliers.

[Peintre et graveur français, Jean-Baptiste Camille Corot (1796 – 1875) est également chevalier de la Légion d’honneur et en 1867, Officier de la Légion d’honneur. Ses parents tenaient un magasin de mode très réputé à Paris à l’angle de la rue du Bac et du quai Voltaire. Les voyages en Italie, passage obligé de nombreux peintres, apportent à son art des archétypes ( la  moissonneuse, l’Italienne…) et une lumière particulière. Corot travaille de façon rapide avec des traits de pinceau rapides et larges. Il est considéré comme un des précurseurs de l’Impressionnisme.]

Jusqu’au 8 juillet 2018 au Musée Marmottan Monet – Paris

 

Anne-Laure FAUBERT et Tiphaine LATROUITE

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