Le « Dit du Genji » de la poétesse japonaise Murasaki Shikibu: 1000 ans d’imaginaire au musée Guimet

Célèbre pour le raffinement de son art de cour et son effervescence artistique, le Japon impérial de l’époque de Heian (794-1185) a vu notamment la naissance d’une œuvre majeure de la littérature classique japonaise, le Dit du Genji. Cette période de liberté pour les femmes, voit notamment l’émergence d’une littérature féminine, unique dans l’histoire du Japon. La poésie chinoise kanshi reste l’apanage des élites masculines gouvernantes alors que les femmes s’emparent des poèmes de style waka qu’elles rédigent à l’aide d’un système d’écriture cursive dérivé du chinois et adapté à la langue japonaise d’alors. Libérées du modèle chinois, ces poétesses vont écrire des œuvres mêlant waka et prose, sous forme de journaux ou d’histoires racontées.

La poétesse Ono no Komachi (vers 825-900) Attribué à Tosa Mitsunori
Époque de Momoyama (1568-1603)
Paris, Musée national des arts asiatiques – Guimet,
© RMN-Grand Palais (Musée Guimet, Paris) / Thierry Ollivier

Écrit au XI° siècle par une femme, la poétesse Murasaki Shikibu, et considéré comme le premier roman psychologique de l’Histoire, le Genji est à l’origine, depuis sa création il y a mille ans, d’une iconographie extrêmement riche, influençant jusqu’aux mangakas contemporains. Il a ainsi inspiré de nombreux artistes et artisans du Japon à travers les siècles, parmi lesquels Itarô Yamaguchi (1901-2007), maître tisserand à Kyoto, dont quatre rouleaux tissés exceptionnels sont présentés pour la première fois dans leur intégralité.

Boîte en laque, Japon, 18e siècle, ancienne collection de Marie-Antoinette, © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) – Thierry Ollivier

Dans une scénographie évoquant l’architecture traditionnelle japonaise, l’exposition  » A la cour du Prince Genji 1000 ans d’imaginaire japonais » au musée Guimet aurait dû initialement se tenir à Lyon en 2020 au musée des tissus et se voulait un hommage à la méthode Jacquard française. A la cour du Prince Genji 1000 ans d’imaginaire japonais rappelle tout d’abord l’influence du bouddhisme sur la pensée japonaise de l’époque ainsi que leur intérêt pour la nature, à la fois révérée et crainte. C’est par ailleurs la première fois qu’apparait la notion de l’aspect éphémère des choses et des êtres. L’exposition fait découvrir aux visiteurs l’influence de ce roman sur les laques, estampes, tissus, kimonos, peintures et objets précieux, et notamment la collection de boîtes de laques de Marie-Antoinette. A la cour du Prince Genji 1000 ans d’imaginaire japonais se poursuit ensuite de façon plus moderne avec la reproduction sur les murs et le sol de la récente édition de l’adaptation du Dit du Genji par Sean Michael Wilson, illustrée par Inko Ai Takita, de mangas inspirés du Dit de Genji.

Itarô Yamaguchi (1901-2007) regardant ses rouleaux © Akira Nonaka

Par la présentation exceptionnelle des quatre rouleaux de maître Itarô Yamaguchi cette exposition rappelle l’influence qu’eut la France, avec l’invention du métier Jacquard, dans le développement de l’industrie textile japonaise. Un hommage de toute beauté….

Anne-Laure FAUBERT

A découvrir jusqu’au 25 mars 2024.



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