Le musée Jacquemart-André présente, jusqu’au 20 juillet 2015, une exposition consacrée à la peinture italienne de la Renaissance avec quelques Ribera, peintre espagnol, dans sa période romaine. Caravage, Masaccio, Piero della Francesca ont tous en commun d’avoir été étudiés ou redécouvert par Roberto Longhi (1889/90 – 1970). Historien de l’art, critique, collectionneur, cet homme était avant tout un « connoisseur » c’est-à-dire un penseur privilégiant la mise en perspective, amateur éclairé et exigeant. Dotée d’une très grande culture, d’une connaissance précise des œuvres, il était également capable – tel Malraux – d’effectuer des rapprochements audacieux. Ainsi, il authentifia un tableau de Caravage – Saint Jean-Baptiste vers 1602 – sur la foi d’une conviction profonde et avant même que ne soient découverts les documents qui depuis attestent de cette attribution.
Caravage (1571 – 1610) Garçon mordu par un lézard © Firenze, Fondazione di Studi di Storia dell’Arte Roberto Longhi
On reproche souvent aux expositions de Jacquemart-André de survendre par le titre. Cette fois ci, l’exposition s’ouvre avec une salle consacrée au Caravage (dont j’avais parlé lors de mes escapades romaines ici) puis remonte dans le temps. L’apport du clair-obscur et le cadrage serré sont autant d’apports majeurs de l’artiste à l’histoire de l’art. Sa modernité n’en est que plus criante quand on découvre le traitement de la Passion du Christ par les caravagesques comme Manfredi ou Borgianni. Plus formalistes, leur traitement du sujet, avec la présence de nombreux personnages, perd en force et se rapproche de la scène de genre.
Les peintres du Trecento du nord de l’Italie (XIV°s) souffraient dans les années 1930 d’un certain désintérêt par rapport aux peintres florentins de la même période. Roberto Longhi les réhabilita, et notamment Giotto, en montrant leur remarquable maitrise de l’espace et leur capacité à restituer le caractère des individus. L’esthète fit de même en 1940 avec Masolino et Masaccio. Tandis que l’art méticuleux de Masolino s’inscrit dans la continuité du gothique, celui de Masaccio s’inspire des innovations de ses contemporains.
Masaccio, (1401 – 1428) Vierge à l’Enfant (Vierge à la chatouille) Vers 1426 – 1427
© Soprintendenza Speciale per il Patrimonio Storico Artistico ed Etnoantropologico e per il Polo Museale della Città di Firenze – Gabinetto Fotografico
Et c’est toute la force de cette exposition. Au-delà de la présence de belles toiles, leur réunion tient à un seul homme, qui les étudia avec passion et les remit au goût du jour. J’ai personnellement beaucoup apprécié les Ribera de la dernière salle, issus de la période italienne du peintre. Chaque portrait se singularise par des traits distincts reflétant le caractère des Saints. Et quelle force dans le regard!
Une exposition à découvrir mi juin avec Bulles de Culture.
Jusepe Ribera (1591 – 1652) Saint Thomas Vers 1612
© Firenze, Fondazione di Studi di Storia dell’Arte Roberto Longhi