L’exposition « Bourdelle et l’Antique, une passion moderne », qui se tient au Musée Bourdelle du 4 octobre 2017 au 4 février 2018, questionne notre notion de la modernité. En effet, pour être absolument moderne il faut savoir réinventer le passé, réinterpréter l’histoire au prisme du contemporain. Ainsi chez bien des artistes novateurs l’archaïsme est perçu comme un vecteur de modernité.

La première partie de l’exposition est consacrée à la formation de l’artiste. Le jeune Antoine Bourdelle arrive à 22 ans à Paris. Elève à l’Ecole nationale supérieure des Beaux Arts, il va passer des années à observer et copier l’Antique. On peut découvrir certains de ses nombreux croquis et dessins d’étudiant, au coté d’œuvres de sa collection privée. Cet apprentissage va lui permettre d’acquérir une technique irréprochable mais va aussi nourrir son imaginaire. C’est cequ’on explore dans la deuxième partie de l’exposition: comment l’antique a inspiré l’ami de Rodin et a engendré plusieurs de ses chefs d’œuvres.

Photo © Stéphane Piera / Musée Bourdelle / Roger-Viollet
Ce sont sept sculptures de l’artiste qui structurent cette rétrospective : Pallas Athénée, Apollon au combat, Héraklès Archer, Tête de Cléopâtre, Le Fruit, Pénélope attendant Ulysse et Centaure mourant. Pour chacune de ces œuvres Bourdelle s’imprègne des sources vives de l’Antique pour les réinterpréter.

Reproduction photo : © ARCP Ville de Paris /Constance Asserman
L’Héraklès Archer, œuvre monumentale, qui constitue l’affiche de l’exposition, résume assez bien cet amalgame entre le présent et l’ancien. Inspiré du fameux Torse du Belvédère, dont la perfection est telle que la légende affirme que Michel-Ange aurait refusé de reconstituer les membres manquants, et de L’Archer du fronton du temple d’Aphaïa à Egine, il est salué par la critique, comme un chef d’œuvre, lors de sa présentation en 1910. Les formes sont simplifiées à l’extrême pour donner une œuvre fondée sur la tension et l’équilibre, les vides et les pleins, les droites et les courbes. Bourdelle saisit l’énergie primitive du monde, un dynamisme virile qu’il nous transmet de manière radicale. Le mythe d’Hercule chassant les oiseaux mangeurs d’hommes du lac Stymphale est représenté avec une grande sobriété. Pour parvenir à un tel résultat, Bourdelle travaille d’après un modèle vivant, il fait poser en équilibre un ancien militaire des heures durant. La sculpture si on se penche sur les détails, est pourtant loin d’être naturaliste : pieds démesurés, pose irréaliste … Après Apollon au combat, cette sculpture est un manifeste de style du sculpteur qui met en avant son art de la synthèse et de la structure.
La force de cette exposition est de mettre en parallèle les sculptures de l’artiste avec celles qui l’ont inspiré. Outre les nombreuses œuvres antiques, on nous présente aussi des tableaux de Cézanne, de Puvis de Chavanne ou de Picasso. Bourdelle est lui même une source d’inspiration pour ses prédécesseurs comme Henri Laurens ou son élève Germaine Richier dont les travaux font aussi partie de la rétrospective.
Alice PAILLAT