« Je traite les gens comme des symboles, (et) en même temps comme des individus. » Andres Serrano
C’est une exposition dont je suis sortie mal à l’aise – après tout l’art est fait pour susciter des émotions diront certains – et qui m’a rappelé par certains égards des œuvres vues à Londres l’été dernier à base d’urine d’Andy Warhol.
Portraits de l’Amérique, au musée Maillol, commence et se termine par le drapeau américain – rappel du rêve américain qui a fonctionné pour l’artiste Andres Serrano et sa famille – et se concentre sur les Etats-Unis et les expérimentations de l’artiste avec des fluides humains.

En parcourant cette exposition constituée de 89 œuvres emblématiques, le visiteur est plongé dans une Amérique pleine de contradictions. Deux séries distinctes – Natives et America, accueillent le visiteur, lui offrant une typologie de « visages américains ». En 1996, l’artiste s’inscrit dans le sillage d’Edward Sheriff Curtis (1868-1952), photographe-ethnologue qui réalisa des portraits monumentaux des peuples premiers d’Amérique. Alors que Curtis souhaite fixer cette civilisation dans sa pureté originelle, Serrano insère ces Native Americans dans le peuple américain et sa diversité. En 2001, Serrano entame une autre série de portraits, America, photographiant une centaine d’Américains de tous âges et conditions. A la manière des peintres anciens mais avec un appareil photo, l’artiste aborde les portraits en se concentrant sur le visage des personnes et leurs attributs sociaux ou professionnels et nous livre une Amérique plurielle, à la fois forte et fragile, comme le montrent les pancartes des sans-abris que l’artiste leur achète 50$.

La violence et la mort sont également abordées via des photos qui peuvent choquer. J’avoue avoir eu du mal à comprendre pourquoi les œuvres évoquant la religion – une Vierge portant un poisson visqueux à la place du Christ, un crucifix issu du commerce trempé dans un mélange de sang et d’urine… – étaient placées juste après les images évoquant la torture… Fervent catholique ayant rencontré le Pape, Andrès Serrano détourne toutefois les produits dérivés religieux, une manière sans doute de critiquer les marchands du Temple ou de critiquer la torture humaine sur le fils de Dieu.
La partie de l’exposition située au rez de chaussée emmène le visiteur dans une exploration plus poussée des fluides humains. On aime… ou pas…
Anne-Laure FAUBERT
Exposition Portraits de l’Amérique d’Andres Serrano au musée Maillol – Paris VII° – jusqu’au 20 octobre 2024